Comme l’indique le titre, Vuillard trouve le motif de ce grand paysage champêtre à l’Étang-la-Ville, dans l’Ouest parisien. Il connaissait bien ce village, alors niché dans une campagne luxuriante où il séjourna l’été, en 1899 et 1900, auprès de son ami le peintre Ker-Xavier Roussel et de sa femme Marie, sa sœur aînée. Au cours de ses promenades dans les environs il découvre de larges points de vue sur la nature d’où naît son intérêt pour le paysage panoramique qu’il va introduire dans sa peinture à vocation décorative. Les panneaux Les Premiers fruits et La Fenêtre sur les bois peints en 1899 pour un hôtel parisien (aujourd’hui au Noton simon Museum of art à Pasadena) témoignent de cette évolution. Inachevé, le panneau de Beauvais est datable de la même période, la plus créatrice de l’artiste.
À partir de 1892 Vuillard travaille comme créateur de décors pour le théâtre. Il s’initie à l’emploi de la peinture à la colle (pigments en poudre mêlés à de la colle, puis dilués dans l’eau chaude). Ce médium devient son favori, car il sèche vite, offre un aspect mat et doux et permet les superpositions, qui caractérisent son style. Il l'utilise aussi pour la peinture décorative d’intérieur.
Dans La Maisonnette à l'Étang-la-Ville, l’agencement des motifs n’est pas régi par la perspective traditionnelle du point de fuite mais par plans successifs, comme dans les estampes japonaises. L’aspect décoratif est accentué par le caractère ornemental des arabesques de la branche d’arbre d’un modernisme « avant » Matisse. Elle couronne la composition déployée sur le fond bleu du ciel. Les verts modulés par touches juxtaposées, dessinant un réseau de feuillages et d’herbe drue, chantent autour du buisson central jaune vif. Seul le pignon de la maison, à peine esquissé, forme une tâche indistincte rejointe par le chemin oblique où se dessine la silhouette très « vuillard » d’un enfant en tablier long à carreaux.
Pour Vuillard et ses amis du groupe des Nabis, « le tableau est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées », selon la célèbre formule de Maurice Denis. Plus qu’un morceau de nature, La Maisonnette à L’Etang-la-Ville est une interprétation en deux dimensions (comme un papier peint ou, plus encore, une tapisserie) d'un paysage que le peintre reconstruit en atelier, en respectant le jeu des harmonies dans la couleur, la forme et l’arabesque.